Karlfried Graf DÜRCKHEIM, HARA, Centre vital de l'homme

L'exercice de la respiration, chapitre I

Il existe une grande variété d'exercices respiratoires inventés par l'homme, qui sont sujets à contestation. On peut, en effet, se demander dans quelle mesure ils atteignent le but particulier qu'ils étaient destinés à remplir, par exemple réussir une performance ou encore corriger une infirmité physique. En revanche, il est un exercice de la respiration valable pour n'importe quelle étape et qui est incontestable : c'est celui qui exerce, rétablit ou consolide la respiration voulue par la nature et correspond au mouvement de transformation originel.
"Exercer" cette respiration signifie apprendre simplement à la laisser venir.
La respiration "juste" n'est pas le produit de la volonté, mais va et vient d'elle-même, sans que le Moi agisse, consciemment ou inconsciemment. Si le mouvement naturel du diaphragme est réduit, le relais est pris par un mouvement des muscles auxiliaires situés plus haut.
Tout l'exercice "juste" de la respiration "physique" a pour but de restaurer la respiration diaphragmatique. Cela a un effet salutaire à tous les niveaux.
Tout d'abord, au stade élémentaire, c'est à dire lorsque la respiration thoracique est limitée et la respiration profonde impossible, comme dans les cas d'affections pulmonaires ou de troubles cardiaques.
Au niveau de la personnalité existentielle, la respiration bloquée en haut indique que l'homme est prisonnier du Moi qui reste toujours sur la défensive et, par conséquent, n'est pas encore vraiment ouvert à autrui ni au monde. Son Moi manquant de confiance lui fait croire qu'il doit tout faire et tout surveiller lui-même, donc aussi la respiration. Il ne la laisse pas venir et partir naturellement, mais la force et déforme l'expiration complète, profonde par une résistance. En d'autres termes, il ne sait pas lâcher prise ni s'abandonner. Aussi cet inconscient blocage respiratoire signifie-t-il un blocage sur la Voie intérieure qui exige le lâcher-prise, l'abandon du Moi.
La première chose à apprendre est donc : laisser s'accomplir de lui-même le phénomène de la respiration. Cela est beaucoup plus difficile que l'on a tendance à le croire. Il est difficile de faire disparaître la tension involontaire due au Moi toujours inquiet, qui se manifeste par un contrôle et un blocage inconscients de la respiration. On s'en rend compte la première fois que l'on fait attention à sa respiration.
Le rythme vivant, naturel, est aussitôt rompu. La respiration s'arrête et le débutant a l'impression de ne pouvoir tout simplement plus respirer comme il faut, il étouffe.

obelix.PNG, fév. 2024